Matin qui s'use au printemps, je marche dans ce pays derrière la mémoire

on n'y voit rien que des plantes séchées par fragments venues de la jeunesse
je marche si longtemps je vous convie à toutes les blessures d'herbe sur les peaux
et c'est au soleil un souvenir d'amour sur la colline on voit les arbres se dissoudre vers la vallée

Il n'y a rien jamais dans le paysage que le désir durable des visages
cette part épurée des chemins
cette part des pierres entassées aux murets millénaires

Matin qui s'offre au soleil au seuil de la maison la femme couvre ses fleurs je marche
je mesure la puissance des pierres aux églises perdues que les lézards corrodent, je vous attends
depuis toujours aux bras nus des rivières, dans l'interstice des douleurs
je vous vois au détour des rives sans geste, sans chanson
depuis quand marchons-nous perdus dans les fragments de la jeunesse
je cherche désespéré vos mains dans le matin qui s'use
derrière la mémoire les mots ne reviennent jamais
et c'est au soleil les pierres des villages nous accompagnent un moment
et vous ne dites rien jamais ce n'est qu'un souvenir d'amour de la colline, c'est toute la terre à vif qu'on voit
je marche dans ce pays de vous qui murmure à jamais.

Agonnay