Les mots qui disent
entre les mots
l'humanité
l'amour s'il se peut
au gré du monde

Les mots
qu'on ne dit pas
qui nous traversent
criblant les corps

L'Ennerie, dernier village avant les marais

Dernières régions humaines
quelques hectares de vigne
que les brouillards au printemps protègent

Au-delà, règne des rouches, des saules barrant les parcelles
au-delà l'oeil étend son embrasement aussi loin que son rêve

Reste l'eau
cheminement de l'innommé

L'hiver en ces lieux-ci passe comme une lente angoisse

Les regards assemblés s'assurent de la solidité des herbes
cherchant la rupture à l'horizon

Montée - l'eau se lève
comme le désastre peu à peu de la mort
elle impose cette course froide au front

Montée, flaque après flaque sur d'autres terres

Des hectares immenses bientôt recouverts
soutenus par des cris d'oiseaux frileux

Longtemps le lac ne fut que cette palpitation

Envahissement, il se forgeait lui-même parole
symphonie, nudité lisse

J'ouvrais des branchages je guettais les tourbillons
l'échouage des souches mortes

Ce battement courait depuis les âges
et venait mourir là, puis se reprendre et puis mourir encore
poussant chaque fois un peu plus cette écume de roseaux
ces restants d'herbes