Hinggi kaworu, coton, ikat chaîne
Maudolu, Sumba, Indonésie
Hinggi kombu, coton, ikat chaîne
Kaliuda, Sumba, Indonésie
Tissu, soie, ikat chaîne
Marguilan, Ouzbékistan
Geringsing, coton, ikat double
Tenganan, Bali, Indonésie
Tissu de sarong, coton, ikat chaîne
Savu, Indonésie
Tissu, soie, ikat trame
Palembang, Sumatra, Indonésie
Flammé, coton, ikat trame
Charentes, France
Tissu, coton, ikat chaîne
Toraja, Sulawesi, Indonésie
Tissu, soie et coton, ikat chaîne
Boukhara, Ouzbékistan
Kasuri, coton, ikat trame
Okinawa, Japon
Bet ana, coton, ikat chaîne
Biboki, Timor ouest, Indonésie
Bidang, coton, ikat chaîne
Iban, Kuching, Sarawak, Malaisie
Tissu de sarong, coton, ikat chaîne
Sikka, Flores, Indonésie
Kimono, ramie, ikat double
Noto Jofu, Japon
Selendang, coton, ikat chaîne
Nggela, Lio, Flores, Indonésie
Pua kumbu, coton, ikat chaîne
Iban, Kapit, Sarawak, Malaisie
Chiné à la branche, soie, ikat chaîne
Lyon, France
Ulos suri-suri, coton, ikat chaîne
Toba-Batak, île de Samosir, Sumatra, Indonésie

L'ikat,
sur les fils, la couleur teinte, réservée.
Sur les fils, l'alphabet
des motifs et des figures.

 L'ikat,
le temps long des mémoires
et des cultures,
textiles porteurs de vie.

Logo du Centre d'Art L’exposition Ikats, tissus de vie, présentée en 2020 à Crest, a été interrompue par la crise sanitaire liée au Covid-19, après un début très prometteur. Aussi, le pôle Culture de la ville de Crest a souhaité qu’une expo sur les ikats soit reconduite.

 

Cette expo, intitulée Ikats, cultures du monde et créations contemporaines présente quelques parentés avec celle de 2020, mais son propos est aussi bien différent, puisqu’elle met en dialogue des ikats traditionnels de différentes régions et cultures du monde, avec des ikats contemporains, créés par Monique et Rémy Prin.

Cultures du monde

Sont présentés dans le détail deux cultures premières, les ikats des Iban du Sarawak, au nord-ouest de Bornéo et ceux de l’île indonésienne de Sumba, où la culture imprégnée de rituel fait (ou faisait) primauté et où les ikats sont un élément clé de la vision du monde et des pratiques rituelles.
Puis les ikats de l’Asie du Sud-Est continentale, Cambodge, Laos, Sud de Sumatra, témoignent de l’ancien brassage des ethnies Tai et de l’influence du Bouddhisme apporté par les marchands indiens, à compter du VIIe siècle. La soie devient très présente dans l’ikat qui change d’ikat chaîne en ikat trame, et dont le rôle sociétal est largement différent.
Les ikats de l’Asie Centrale, somptueux et chatoyants, sont appelés en persan daraï, ce qui veut dire  “ bien précieux ”. L’ikat, à l’unisson des décors couvrant les mosquées ou les mausolées, renvoie ici aux valeurs visuelles de l’Islam.
Enfin, l’ikat au Japon, en provenance de l’archipel d’Okinawa au sud, s’est développé aux XVIIIe et XIXe siècles, comme un tissu de la classe marchande et populaire. Ikat double à motifs géométriques ou ikat trame avec des figures symboliques proches de l’image.
Chacune de ces cultures ont produit des ikats bien singuliers, en quelque sorte des signatures différenciées, des reflets d’identités à la fois culturelles, géographiques et ancrées dans le temps.

Ikats, cultures du monde et créations contemporaines

• L'exposition occupe tout le Centre d'Art, une bonne moitié est consacrée aux ikats des cultures du monde, le reste aux ikats contemporains. Des panneaux d’interprétation et des cartels développés situent les pièces. Trois séquences vidéo, sur la réalisation de l'ikat chaîne et de l'ikat trame, sont également diffusées en continu, pour appréhender la complexité des réalisations.

• Contact : 04 75 76 61 38 ou Cette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser.

• Le site web : http://www.centredartdecrest.fr/

• Vernissage le 9 février à 18h30

• Exposition du 10 février au 28 avril 2024

• Visites guidées avec Monique et Rémy Prin : les Samedi 10 février et Dimanche 28 avril à 14h30, 15h30, 16h30 et 17h30. Entrée libre, dans la limite des places disponibles. Réservation conseillée.

• “ L’ikat, un voyage à travers les cultures ”, conférence avec visuels par Rémy Prin, Samedi 27 avril à 17h, à l’espace Soubeyran, salle Coloriage. Entrée libre, dans la limite des places disponibles. Réservation conseillée.

Créations contemporaines

En regard de ces témoignages pour la plupart désormais du passé, au fur et à mesure que les cultures se délitent et que les pratiques sont confrontées au diktat de l’économie globalisée, quel sens peut détenir, ou tout au moins quelles questions peut poser, une pratique de création contemporaine de l’ikat ?

Nous avons créé des ikats de 1975 aux années 1990, puis dans une sorte de revival à partie de 2019. Ce fut d’abord une pratique intensive artisanale, dont la finalité était de créer des robes, des manteaux, des tuniques… Et ceci dans un bonheur de découverte et d’expérimentations multiples.
Puis, simultanément aux recherches sur les ikats traditionnels et à leur collecte, nous avons mis en œuvre des recherches visuelles plus organisées. Cela s’est fait en plusieurs vagues. Celle de la mise en rapport du mouvement de l’ikat dans le textile avec celui des modes d’entrelacement des fils. Puis celle des couleurs – fusion ou geste – au sein de la toile ikatée, bien différente de la peinture. Et enfin, celle des formats, des pages, de l’écriture du signe visuel toujours aux prises avec la précarité, l’ordre qui survit au désordre.

Avoir pratiqué longtemps le processus complexe et lent de la réalisation d’ikats nous a appris l’humilité, le dialogue avec le réel qui déjoue parfois tous nos vouloirs, toutes nos rigueurs. D’autant que nous ne disposons plus d’un modèle culturel qui servirait de guide. Le créateur, pour peu qu’il ne gonfle pas son ego comme le veut souvent le monde de l’art aujourd’hui, se doit à cette humilité, forgée dans la solitude. L’ikat, qui fait le signe visuel, et le tissage qui l’incarne et fait la toile, sont comme deux langues qui se conjuguent, deux opérateurs de ce qui s’assemble.
Et c’est sans doute ce témoignage à nu de l’assemblage, dont nous avons tant besoin aujourd’hui, que nous avons cherché à mettre à jour, en explorant, à tâtons parfois, et parfois confusément toute cette complexité des réserves, des teintures, du binaire des couleurs et du binaire des fils.

Quelques images
  ex robe ouzbekistan  ex couleurs 2  ex rangees colonnes

Petit parcours sans prétention, qui fait un focus sur les ikats contemporains, créés par Monique et Rémy Prin, depuis 1979 :

 Des panneaux d'interprétation accompagnaient les ikats contemporains. Voici le texte d'un de ces panneaux :

 Tisser l'ikat

Dès le départ, l’ambiguïté du fil
en ce qu’il propose de concret, et l’itinéraire fuyant,
cette infinitude, ce lieu d’enchevêtrements

Nous parcourons l’originel, les termes emmêlés
Rien ne touche à la certitude
comme les fibres tenues ensemble
et rien qui n’appelle autant le doute

Vient la couleur
dans la surface illimitée des clivages de fils
le manque encore, étalé
Couleur, et peut-être est-ce là
plus fragile et plus lointaine conscience
comme un récit
parent de l’évanouissement,
parent du seuil perceptible des sens

Sur le fil
les assemblées balbutiantes des couleurs
au secret des filaments,
ce qui s’imbibe de l’écriture du jour
langage encore clairsemé,
aux écoutes des zones vierges en lui

Fragments encore, des teintes
et quelle règle du jeu pour elles
qui soit plus humble plus réelle
comme celle des croisures

Conjoindre ces deux rumeurs :
la couleur qui s’étend
la croisure qui prend espace
se multipliant
sans dirait-on de limites

Écrire le nomadisme du tissu dans l’âme
ce langage de l’immémorial
de la fluidité ouverte.