Saint-Hilaire est la " grande " église romane de Melle, bâtie en contrebas, dans le vallon creusé par la petite rivière la Béronne.
L'approche
L'étrangeté ne s'arrête pas là. Un portail nord, ce qui est rare, et qui plus est, doté d'une sculpture monumentale. Un portail sud, qui ouvrait jadis sans doute vers le cloître et les bâtiments monastiques, mais qui est sculpté sur ses voussures à l'intérieur actuel de la nef. Une profusion d'images sur les chapiteaux, mais de factures bien différentes, dont certaines ont été restaurées au XIXe siècle tellement bien que, disait à l'époque Mérimée, " il est difficile de distinguer les copies des originaux ". Et les restaurations architecturales ont aussi retouché l'ensemble... qui reste pourtant attachant.
À commencer par la façade ouest, dont l'organisation est clairement lisible, scandée par des corniches portant modillons et des faisceaux de colonnes doubles. On retrouve au registre supérieur les trois baies du bas : les fenêtres à cet étage sont décorées, claveau à claveau, de motifs végétaux variés – palmettes, rinceaux en S perlés, fleurs stylisées – exécutés avec brio.
Dans les différences, la quête
Devant le mur nord, c'est évidemment le grand cavalier et son cheval, une figuration de Constantin terrassant Arius et son hérésie, qui captent le regard. L'observation attentive de l'image montre les parties restaurées à la fin du XIXe siècle. On se dit que Saint-Hilaire mériterait une étude systématique plus qu'une simple déambulation, on se dit qu'on reviendra après avoir mieux compris, avec les sources à portée de main...
Dans la nef, l'impression de vertige s'accentue, tant les styles des chapiteaux varient. Virtuosité de certains, aspect fruste pour d'autres, le regard flotte, hésite, l'attention se dissout avec l'émotion en allée...
Alors, le regard se fiche devant le portail sud comme le corps s'arrête au sommet d'une colline quand il voit face à lui se dérouler les lointains clairs de l'horizon. Ici, en une voussure, intrados et extrados, quelques dizaines de figures nourrissent la quête à nouveau. Petits personnages nimbés, à côté du Christ bénissant, certains tenant un livre : là aussi, leur aspect semble rustique, mais il y a la vie dans ces images, par les postures, par les détails des vêtements... À l'intrados, chaque petit claveau porte aussi une figure du bestiaire ou un motif végétal. Il s'en dégage une fraîcheur, un chant vivifiant. Densité ramassée de la pierre, qui laisse peu de place à l'expression. C'est là pourtant qu'elle s'épanouit le mieux. Certains ont vu dans ce portail un des prémices du portail sud d'Aulnay : l'image ici n'est pas aussi puissante, accomplie, mais elle puise au même élan.
Une citation
Le premier document mentionnant l'église Saint-Hilaire se rapporte au don qu'en fait, en 1080, Maingot, seigneur de Melle, à l'abbaye bénédictine de Saint-Jean d'Angély; d'autres textes de 1086 et 1088 évoquent les moines de Saint-Hilaire et leur "hospital". L'édifice actuel est construit au cours du XIIe siècle, sur le chemin des pèlerins venant de Celles-sur-Belle.
Pascale Moisdon-Pouvreau, Melle, images du patrimoine, Inventaire général du patrimoine culturel et Geste éditions (2006)