Bet ana, coton, ikat chaîne
Biboki, Timor ouest, Indonésie
Chiné à la branche, soie, ikat chaîne
Lyon, France
Geringsing, coton, ikat double
Tenganan, Bali, Indonésie
Flammé, coton, ikat trame
Charentes, France
Hinggi kaworu, coton, ikat chaîne
Maudolu, Sumba, Indonésie
Tissu, soie, ikat chaîne
Marguilan, Ouzbékistan
Tissu de sarong, coton, ikat chaîne
Savu, Indonésie
Tissu, soie et coton, ikat chaîne
Boukhara, Ouzbékistan
Tissu de sarong, coton, ikat chaîne
Sikka, Flores, Indonésie
Hinggi kombu, coton, ikat chaîne
Kaliuda, Sumba, Indonésie
Tissu, soie, ikat trame
Palembang, Sumatra, Indonésie
Kasuri, coton, ikat trame
Okinawa, Japon
Selendang, coton, ikat chaîne
Nggela, Lio, Flores, Indonésie
Tissu, coton, ikat chaîne
Toraja, Sulawesi, Indonésie
Ulos suri-suri, coton, ikat chaîne
Toba-Batak, île de Samosir, Sumatra, Indonésie
Pua kumbu, coton, ikat chaîne
Iban, Kapit, Sarawak, Malaisie
Kimono, ramie, ikat double
Noto Jofu, Japon
Bidang, coton, ikat chaîne
Iban, Kuching, Sarawak, Malaisie

L'ikat,
sur les fils, la couleur teinte, réservée.
Sur les fils, l'alphabet
des motifs et des figures.

 L'ikat,
le temps long des mémoires
et des cultures,
textiles porteurs de vie.

Comme bien d'autres sociétés premières en Asie du Sud-Est insulaire, les Iban valorisent la femme à travers ses talents de tisserande et l'homme à travers sa bravoure guerrière.

Plus précisément, une femme atteint son accomplissement et sa pleine puissance de séduction en sachant tisser les pua kumbu. La beauté d'une femme est d'ailleurs comparée par les hommes à celle des pua. Une femme qui maîtrise les réserves et la teinture est hautement considérée par la communauté. Cette maîtrise est le fruit d'un long apprentissage qui commençait autrefois vers l'âge de 12 ans par du tissage simple, puis par la réalisation d'un tissu de jupe.

L'homme, lui, atteint l'idéal de sa condition dans la violence rituelle et notamment en devenant un chasseur de têtes talentueux. Ce sont les dieux qui ont enseigné la vertu de la chasse aux têtes aux Iban : pour terminer une période de deuil, on devait rapporter d'un raid les têtes des ennemis. Le sacrifice d'une tête ennemie levait la période de mort de la communauté.

Ces têtes trophées étaient ramenées à la maison longue. Les guerriers attendaient en bas de la maison que les femmes sortent avec dans leur bras un pua kumbu de haut rang. L'homme plaçait la tête sur le pua, la femme alors l'entourait du tissu et berçait la tête contre sa poitrine. Ainsi, les deux modèles fondateurs de l'humain, textile et violence, s'unissaient pour célébrer la tête trophée, qui apportera bénédiction et bienfaits à la maison longue, et qui sera conservée et entretenue longtemps.

Comme les hommes qui risquent leur vie en allant chasser les têtes, les femmes sont en danger quand elles teignent ou tissent des pua kumbu. La cérémonie rituelle du ngar, qui rassemble les femmes pour préparer les teintures, s'appelle d'ailleurs “ le sentier de la guerre des femmes ”. Créer pour une femme un motif de forte puissance sacrée, c'est s'exposer intimement. La réussite et l'harmonie de la société dépendent de la bonne conjonction du textile sacré et de la violence rituelle.

De fait, les Iban ont arrêté la chasse aux têtes vers les années 1930, avec quelques résurgences durant la guerre avec les Japonais après 1941, ce dont on ne peut que se réjouir. Mais la pratique culturelle s'est vue ainsi défaite d'un de ses deux principaux piliers. Même si les fêtes rituelles ont continué, le tissage des pua kumbu, qui a aussi continué et continue encore de manière précaire, est devenu comme orphelin.

  Détail du Buah Sempuyong, pua kumbu

Les sempuyong sont des paniers en forme de cône, fabriqués en bambou, qui servent de réceptacles aux offrandes lors des fêtes rituelles. Autrefois, on y plaçait les têtes des trophées.
Trois grands losanges entourent chacun deux motifs sempuyong, placés en symétrie vers le haut et le bas.