1er récit des tombes
C'est parmi les centaines de khatchkars, au flanc d'une immense terrasse, vers le sud l'air est d'une singulière transparence, au-delà des rives du lac. On a déjà marché longtemps dans cet espace, le regard attiré par les hautes croix. Puis on découvre ces autres pierres allongées, plus modestes, on dirait les traces joyeuses d'une vie, parmi les fleurs.
Qui étiez-vous, un homme sage, vous qui croisez les bras sur la poitrine ? Comme souvent les visages de ces pierres, il n'y a de vos traits qu'un contour minime qui penche un peu, qui dit le calme de votre regard sur le monde.
Vous êtes seul sur cette tombe, mais à côté, on a figuré deux croix qui se tiennent les mains et entre elles, au-dessous, un enfant-croix. Votre vêtement est juste marqué de plis, de striures sur la pierre, à peine une texture sobre. Les croix, elles, ce sont des liens qui, s'assemblant, se construisent et prennent leur forme d'objets croix. La croix n'existe que dans ce qui lie.