A Kirants, une nuit, avec autour de la maison, le jardin.
Cette maison dans le haut du village,
à l'étage c'est une sorte de verrière,
on devine au loin dans l'échancrure
l'autre pays voisin.
La nuit le vent doux fait battre les vantaux,
au loin dans l'échancrure
les orages, qui se lèvent, lumière et foudre.
Voit-on plus loin que ce jardin,
dans le petit enclos des murs
la terre entière ici dans la main la verdure
les plantes alignées, l'eau conservée,
voit-on plus loin, l'autre pays
d'où les orages viennent.
C'est dans la paix d'été
les jeunes parlent sur la place
les vieilles gens font leur terre fertile
rumeurs des hommes, de l'eau
musiques, corps vivants
si près, l'autre pays
il y a peu
ceux qui moissonnaient vers la frontière
ceux-là, dans la violence,
sait-on jamais la paix fragile
la douceur extrême avant l'innommable ?
Cette maison pour une nuit,
semblance paisible de l'abri
le bassin d'eau pour le jardin
les fruits qui gonflent
les femmes plus bas dans le village
qui laissent leur corps amoureux en allé,
vent doux, chercheur dans la lumière
le voyageur ne cerne rien
il est pour une nuit, dans la béance, empli
des visages vus, paysages éclairés,
dentelles des instants,
il voit ce pays voisin
du haut de la verrière,
il n'a que son temps
improbable, fugace, il voudrait
des échos, des certitudes,
qu'enfin la terre l'apaise.