3ème récit des lettres
Il n'y a plus que la langue ici qui fait décor. Dans ce lieu où les sculptures couvrent les autres bâtiments, les bâtisseurs au XIIIe siècle ont voulu cette seule entrée dans la langue au fronton de cette modeste chapelle funéraire.
Les caractères sont amples, ils peuplent l'arc, l'intrados et le tympan, leur relief est doux. On les découvre dans la lumière du matin, pâle encore, la pierre est blonde et rouge comme les falaises alentour, l'oeil se repose, il prend d'un seul tenant ce champ de lettres courbées sous le vent des années...
Nous ne savons rien des lettres, même les nôtres, celles qui font les mots du quotidien, que l'on écrit pour le sens et le partage. Nous ne prenons plus garde aux lettres, à ce dessin qui les fonde, courbe ouverte sur l'espace, symétries, et ce mouvement qui fait de l'une à l'autre le porteur de la parole. Ici le moindre accent, le signe qui fait liaison nous questionnent, nous cherchons dans l'incompréhension ce qui donne cohérence à l'espace, le rythme, nous voudrions l'impossible dialogue.