Edjmiadzin
Église Shoghakat • Détail de la façade ouest
Geghard
Des femmes vendant leurs gâteaux
Kobayr
Visage du Christ de l'abside
Ererouk
Restes de la façade
Bjni
L'église Saint-Serge
Moro dzor
Chemin dans le village
Ketcharis
Le bac à bougies
Aghitou
Une pierre tombale
Noradouz
Détail d'un khatchkar
Yovhannavank
Église St-Jean-Baptiste • Le tympan, parabole des vierges
Erevan
Manuscrit au Matenadaran
Areni
Pierre tombale près de l'église
Haghbat
Église St-Signe • Les donateurs, Sembat le roi et son frère Gourguen
Makaravank
Église principale • Motif polylobé
Noradouz
Le troupeau qui rentre au village
Gochavank
Le monastère vu du bas de la colline
Tatev
Motif sur le tambour de la coupole
Sevan
L'église des Saints Apôtres et le lac
Tegher
Croix sur les pierres de la façade
Gochavank
Tympan • Chapelle de l'Illuminateur

Terre perdue
dans l'entre monde
peuple dispersé
comme jamais témoin
de notre devenir.


Terre précaire
depuis toujours
entre la résistance
et l'universel.

Nous entrons dans la petite église "des Zakarides". Grande pénombre dans cette mince nef qui fait le calme en soi, et peu à peu les fresques qui émergent, dont tous les murs autrefois étaient couverts. On scrute une à une les scènes, il reste des fragments de couleur et les tracés, parfois précaires, parfois lumineux. On ne voit des fresques que la trame, on se dit que leur dégradation proche de l'effacement ressemble à leur naissance, à leur esquisse, avant que le fresquiste n'appose tous ses pigments.

Silhouettes penchées des apôtres pour la communion, courbes douces du visage de la Vierge, tout est à portée de main, mais l'ombre protège de la confrontation violente avec l'image, du face à face où le regard serait dépassé par la représentation, dans cet espace confiné. C'est comme un dialogue avec des détails seuls, qu'on éclaire un à un, comme une émotion dispersée, que l'imaginaire tente de recoudre. Nous nous serrons entre nous, les uns les autres, inconsciemment, pour mieux déceler l'invisible.

Kobayr, église des Zakarides
'...ressemble à leur naissance, à leur esquisse...'

À la sortie, une porte à gauche et derrière, le soleil. On entre. Soupirs soudain qui nous échappent, tout ce qu'on voit fait rupture, diffère sans doute de ce que le corps pressentait. On entre, mais c'est pour être sous le soleil qui de l'ouest éclaire une immense abside couverte de fresques. La voûte et le mur sud ont disparu. Peut-être est-ce la première sensation, on entre, mais c'est la lumière seule, sans limite, le corps qui s'attend à l'orbe fermé de l'espace jubile, le corps ouvert comme le ciel. Et dans l'instant, ces images monumentales que les flots de lumière font vivre, à tel point que celles qu'on vient de voir dans l'ombre semblent dissoutes par cette présence aiguë, irradiante.

Kobayr, église principale
'...on entre, mais c'est la lumière seule, sans limite...'

Rarement ai-je senti comme cela les images nous regarder, certaines de leur puissance de séduction, apprêtées qu'elles sont par la lumière, offertes aussi, plus nues dans cet espace en ruines, plus réelles et plus illusoires. Quand leur étreinte se desserre un peu, qu'on se sent moins subjugué, on cherche à se situer malgré soi, on voit cette église tout au bord du ravin, corps blessé, images à vif et le regard qui suit la courbe des montagnes, découvre là-bas plus loin, la ville de Toumanian, les terres du poète...

 

"Et, des grottes sombres des rochers moussus,
Des muettes profondeurs silencieuses des vallées touffues,
J'entends de nouveau l'écho
Du rire sonore de mon âge enfantin.
32"

 

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32 Hohvannes Toumanian, Anouche, in Oeuvres Choisies, op. cit.