Détail d'un sarong, ikat chaîne
Sikka, Flores, Indonésie
Nous tentons...
Poème (Rémy Prin)
Il n'y a jamais...
Poème (Rémy Prin)
Pua kumbu, ikat chaîne
Iban, Sarawak, Malaisie
Visage
San Juan de la Pena (Aragon, Espagne)
Saintongeoise
Détail de la coiffe
Tissu de flammé, ikat trame
Charentes, France
Détail d'une robe, ikat chaîne
Urgut, Ouzbékistan
Fresques de l'abside
Kobayr (Arménie)
Les églises du monastère
Noravank d'Amaghou (Arménie)
Voussure du portail
Foussais
Coiffe de deuil
Mazières sur Béronne
Bestiaire au portail sud
Aulnay
Hinggi kombu, l'arbre à crânes, ikat chaîne
Kaliuda, Sumba, Indonésie
Carré du marais
St-Hilaire la Palud
Panneau de soie, ikat chaîne
Boukhara, Ouzbékistan
Détail d'un khatchkar
Gochavank (Arménie)
Motif à l'araignée, ikat trame
Okinawa, Japon

Ce qui a duré
dans la mémoire des hommes,
ce qui fait culture,
paysages de la terre
ou pays de l'esprit,
ce qui peuple le voyage,
les vies, la plénitude,
le patrimoine, ce n'est rien
que ce lien fragile
de ce que nous sommes
à ce que nous devenons.

Patrimoine à Dol de Bretagne

C'est dans l'entrée d'un bâtiment très vieux, comme revenu des brumes incertaines dans l'enfance, il y a des objets dans le couloir, des murs marqués d'inscriptions, de hautes portes, vous attendez parmi les photos d'autrefois, vous respirez cet air un peu fané un peu distant.

On a mis dans l'escalier une peinture immense que personne ne regarde plus, avec des femmes qui disent la patrie peut-être, ou la guerre. Vous êtes dans ces mots désuets, qui ont duré longtemps dans la mémoire des hommes, images qu'on met encore sur les murs, symboles qui n'en sont plus, mais cela fait comme dans les églises où la force du temps fait le silence.

Et vous attendez là dans les murmures et l'homme arrive et vous entrez dans un bureau très grand, il vous salue il a la voix très douce, incertaine, de ceux qui marchent dans l'intérieur d'eux-mêmes. Il dit "Voilà, la mer venait jusque là il y a mille ans", et sur l'image dans l'horizon c'est la marée qui vient. Il montre les remparts il dit l'histoire les moines et les évêques et les ducs de cette terre de Bretagne. Il parle des sept saints de sa terre, en comptant sur ses doigts comme pour l'essentiel. Et la voix parfois s'arrête comme au rebord d'elle-même, comme si le fil de l'histoire soudain faisait un écho plus profond dans son corps.
Vous êtes là, plusieurs, assis en cercle devant la grande table qui marque l'importance du monde. Vous entendez cet homme affable et doux, il parle de sa ville et des projets des hommes, et c'est comme une berceuse dans l'enfance, entre l'émerveillement et la tendresse, quand la chanson longe la tristesse ou le malheur sans l'approcher vraiment.

Il dit "Ce n'était pas facile, et tout le monde a trouvé cela formidable", il dit très lentement les espoirs, les erreurs, le jeu des hommes dans le monde, et c'est le soir qui vient, qui fait sur votre peau un peu plus d'ombre.

Et la musique dure longtemps comme les vagues aux pieds de la ville il y a mille ans, avant que les hommes aillent chercher dans le granit cet élan vers l'ailleurs.

Vous êtes levés, vous allez partir, et l'homme montre encore au mur une peinture ancienne "Voyez c'est une femme d'ici", et vous regardez ce visage coiffé de dentelle, cette silhouette assise toute tassée dans le noir, au bout de la douceur de la mort, qui dit encore émerveillée tout ce restant de la lumière qui cogne à la porte du temps.

À Dol de Bretagne, en 2003

Écriture en mai 2021

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