Cela fait dix-sept ans que nous avons passé quelques jours à Kachgar, cette ville aux confins du Xinjiang, autrefois nœud d’échanges de la Route de la Soie.
La Géorgie a gardé une profusion d’églises, dont beaucoup sont ornées de fresques. C’est un merveilleux observatoire de la permanence et des évolutions de l’image byzantine, en plus d’une immersion dans un territoire magnifique.
On a continué de remonter la route militaire, qui se faufile dans les immenses trouées vertes de ces montagnes qui pourtant n’écrasent pas le paysage, comme si la grandeur magnifique ne sombrait jamais dans le vertige ou l’arrogance.
C’est la route du Nord, qui monte vers la Russie, la voie des invasions depuis toujours, la grande route militaire dit-on aujourd’hui.
“ On prend la route de la steppe ”, dit Lela notre guide, avec son air un peu triste et ses grands sursauts de lumière. Au fur et à mesure qu’on s’éloigne de la capitale, les villages et leurs habitations semblent se décomposer.
Quelque part en Siounie, dans ce sud arménien, nous avions éprouvé cette étrange sensation d’être en rapport intime avec la terre, et ses espaces et ses plissements de montagnes immenses qui toujours ouvraient le regard vers l’ailleurs, dans les ambiances bleutées du ciel doux. En peu d’endroits, j’ai senti à ce point l’espace nous accompagner, comme à un apogée d’intimité et de grandeur.
C’est à quelques kilomètres de Paksé, la ville du Sud, au Laos. Le Mékong est déjà large de plus d’un kilomètre. Sur ses rives, presque face à face, deux villages où les femmes consacrent l’essentiel de leur temps au textile.
De Luang Prabang, nous partons en début d’après-midi vers le Nord, à cent cinquante kilomètres, vers les villages à l’écart de la foule.
D’un côté, le Mékong, déjà empreint d’ampleur et de calme, l’image de légende, de l’autre la rivière Nam Kham et, entre les deux, jusqu’à leur confluent, un bout de terre : c’est là que s’est construite la ville.
Au village, nous sommes à nus avec la terre. Les maisons donnent sur le paysage, on passe du vent ou du soleil à ce qui nous en protège.