On a rempli cette vie
sans le savoir vraiment, avec notre regard
qu’on partage parfois devant la terre des hommes.
On se retourne, les instants en guirlandes
se comptent par milliers, on pourrait en faire
la dentelle d’une vie rêvée, à peine qui murmure
dans l’écho des années on ne sait pas bien ce qui reste
on ne sait pas bien notre prise au monde,
ce qu’on a mis dans la pauvre sébile des jours.
Quels sont les gestes, les actes qui font le commun
des humains sur cette terre que nous continuons de spolier
plus ou moins tous ensemble
sans le savoir vraiment ?
Quelle part pour l’autre, et pour nous-mêmes ?
On a rempli cette vie
des milliers d’instants bienheureux
L’amour abolit la douleur, et le temps même
parfois l’éternité d’un visage offert
on ne sait pas comment cela s’est conservé
depuis des décennies
cette image au bord des larmes
d’un corps furtif qui a peur de lui-même.
On ne sait rien, même la musique des mots
nous échappe à jamais, on tente de recoudre la phrase
qui s’est déjà perdue
On tente l’impossible
qui écarterait à jamais la douleur.
Mais la vie s’est remplie,
entre le soleil et le regard,
à peine qui murmure, le rêve
qu’on touche par instants de l’amour inextinguible
qui avance, ignorant
tous les désirs marchands du monde.
À l’heure presque du bilan, c’est le partage
entre l’effroi, l’immense douleur
et ce peu de radicale lumière
à partager à jamais
avec tous les instants si précaires soient-ils
de la terre des humains.
Sait-on ce que nous sommes devenus,
nos gestes en terreau décomposés
pour quel futur de ceux qui suivent ?
Nous avançons à grand peine chacun sans bien savoir
ce qu’il en est de remplir une vie
à tâtons
entre les certitudes, le soir, de certains visages
et l’ignorance de ce qui nous a fait.
Écriture 16 août 2022