La saison revenue des oiseaux
comme un bienfait sur le monde
la huppe, le coucou, les merles, bientôt le rossignol
toutes les musiques et la poussée des sèves,
des fleurs au verger
et des légumes sur la terre
tout ce qui fait la ténacité des vies perpétuées
offertes au soleil,
et leur fragilité, les évidences qu’on voit des saisons
mais de les vivre à même la terre
dans la trame du village
change tout du bonheur ou du malheur de ce monde
ici tout à portée de main.
Et la fragilité nous blesse chaque année plus encore
quand gagnent les jours de sécheresse
et que se défont trop tôt les chants des oiseaux.
Parce que le temps nous est compté,
le nôtre et peut-être celui de l’humain,
nous aimons d’autant plus cette saison qui revient
comme si tout était nouveau,
et la mémoire des violences à la terre et à l’homme
se serait en allée,
comme si tout redevenait possible,
du moins le croit-on, juste un instant
quand le chant et le vol de la huppe se conjuguent devant nous,
par vagues,
dans une sorte de grâce indicible.
Quand les jours s’allongent en mai,
le troubadour chantait son amour au loin,
au XIIe siècle, l’amour dit-on s’inventait sur le monde,
ou du moins sa parole
à côté des guerres continuelles.
Qu’inventer aujourd’hui,
d’un amour plus commun, plus étendu,
qui donnerait à la saison nouvelle
un sursaut continu d’humanité ?
Qu’inventer au sein de nos pouvoirs
de nos techniques, de nos actes et regards,
qui jugulerait l’absurdité de la mort ?
Écriture 18/04/23