Le village n’était pas un village, seulement quelques maisons et bâtisses, au bord du chemin qui s’arrêtait là et si l’on continuait c’était la lande, ou des parcelles d’herbe, ou les débris du vent.
Ici, les routes ne faisaient pas circulation d’un pays à l’autre, elles menaient aux maisons, comme si le but ultime de la marche était ce quelque part où l’on s’arrêterait peut-être à jamais. Le territoire tissait sans fin des voies sans issue, on devinait que chaque branche des routes menait à une exception – visages, maisons, bêtes sous le soleil, enclos où l’essentiel des vies se déclinait, chacune isolée, chacune de prime abord à l’écart des autres… Mais cette multiplicité des lieux-dits qui marquait la campagne et qu’on ne pouvait découvrir qu’en y allant vraiment fascinait : c’était à chaque fois la même musique des maisons ramassées, si peu nombreuses, et l’élan toujours différent des hommes arrimés à leur terre.
On regardait le ciel, les pins, les touffes de genêt. On se demandait ce qui tressait l’humanité de ces demeures fragiles. On rentrait avant la nuit, familiers déjà des goélands en cris serrés que le vent marin déportait jusqu’ici.
Écriture en 2008